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Guillaume Soro au journal lepoint : « Il faut qu'Alassane Ouattara recule et que le droit prévale »

Publié le 22/09/2020 à 15:19 | Le Point.fr

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Il a pris parti pour Alassane Ouattara pendant la crise postélectorale de 2010. Guillaume Soro, ex-Premier ministre de Laurent Gbagbo, devenu chef des rebelles, est celui qui a fait basculer militairement la victoire au profit de l'actuel président alors que Laurent Gbagbo lui contestait la victoire dans les urnes. Écarté, avec trente-neuf autres candidats, du scrutin présidentiel du 31 octobre prochain sur décision de la Cour constitutionnelle, Guillaume Soro n'a pas dit son dernier mot. Avec ses partisans du mouvement citoyen Générations et Peuples solidaires, il est fortement engagé dans la dynamique d'opposition au processus électoral en cours que l'ex-président Henri Konan Bédié, appelant à la « désobéissance civile », a qualifié de « forfaiture ». Sur la Côte d'Ivoire et son avenir, il s'est confié au Point Afrique.

Le Point Afrique : Comment voyez-vous la Côte d'Ivoire de l'année à venir ?

Guillaume Kigbafori Soro : Je ne peux m'empêcher de nourrir les pires craintes quand je vois l'obstination avec laquelle le président Ouattara conduit notre pays vers une nouvelle crise électorale, dix ans après celle qui lui a permis d'arriver au pouvoir. Face aux appels à la raison émanant de la France, des États-Unis, de l'Union européenne, des organisations internationales de défense des droits de l'homme, de l'ONU, de certains de ses pairs de la Cedeao, il choisit de faire la sourde oreille et s'inscrit dans une forme de défi lancé au monde entier en prétendant n'avoir de leçons à recevoir de personne. Oui, j'ai peur pour la Côte d'Ivoire.


Nous avons à mener un bien âpre combat de civilisation, pour sauver l'espérance démocratique en suspens et consolider l'État de droit en Côte d'Ivoire. C'est précisément en raison de ce cap inflexible que je vois la Côte d'Ivoire de retour dans le concert des nations africaines en progrès, à l'horizon 2021. Pour ce faire, nous devrons avoir réussi à obtenir le triomphe du consensus national autour de l'organisation d'élections justes, transparentes, inclusives, véritablement démocratiques.

Lire aussi Côte d'Ivoire : Henri Konan Bédié appelle à la « désobéissance civile »

Votre candidature à la présidentielle a été refusée par le Conseil constitutionnel. La Cour africaine des droits de l'homme et des peuples intime à la Côte d'Ivoire de vous rétablir dans vos droits. Pourquoi la décision de la CADHP doit-elle prévaloir sur celle du Conseil constitutionnel d'après vous ?

En vertu d'un principe élémentaire de la hiérarchie des normes juridiques dont le corollaire est celui de la hiérarchie des juridictions. La Côte d'Ivoire, État souverain, a librement adhéré à l'Union africaine et à la Cour africaine des droits de l'homme et des peuples, y compris en signant son protocole. Or, comme le disait si bien Jean-Jacques Rousseau, « l'obéissance aux lois que l'on s'est prescrites est liberté ».

C'est l'État de Côte d'Ivoire qui a souverainement décidé que les décisions juridictionnelles de la CADHP ont primauté sur celles de toutes les juridictions ivoiriennes, y compris le Conseil constitutionnel. Mieux, l'argutie du régime Ouattara qui consiste à dire que la Côte d'Ivoire a dénoncé le protocole de la CADHP ne tient d'autant pas debout que le gouvernement ivoirien sait bien qu'en vertu des textes auxquels il est lié, sa dénonciation du 28 avril 2020 ne prendra effet qu'à compter du 28 avril 2021. Et de plus, la dénonciation ne peut concerner des affaires déjà en cours de jugement à la CADHP. Depuis le 22 avril 2020, la haute juridiction africaine a requis la libération immédiate des députés de notre mouvement, de mes frères et camarades pris en otages par Ouattara.

Par ailleurs, Alassane Ouattara lui-même est le fruit des décisions des organisations supranationales. Rappelez-vous : la Cour constitutionnelle de l'époque dirigée par M. Paul Yao N'Dré avait déclaré Laurent Gbagbo vainqueur de la présidentielle de 2010. En se fondant sur un communiqué de l'Union africaine reconnaissant la victoire d'Alassane Ouattara, la Cour constitutionnelle avait modifié sa première décision et attribué la victoire à Alassane Ouattara. Dans le cas qui me concerne, il ne s'agit pas d'un simple communiqué, mais de deux décisions de justice rendues en ma faveur.


Sous Ouattara, la Côte d'Ivoire a été transformée en État voyou, marginal et arbitraire. Une honte et un affront que le peuple de Côte d'Ivoire doit courageusement laver. Nous n'accepterons pas d'être la risée des peuples libres du monde ! Le droit doit être la force des Ivoiriens !

Lire aussi Côte d'Ivoire – Affaire Guillaume Soro : ce que l'on sait

Les choses se passent comme si le terrain était rendu propice à un conflit des organes en charge des questions électorales, la Cour constitutionnelle, d'un côté, la Commission électorale indépendante, de l'autre.

Un rappel de celui de la crise postélectorale de 2010 n'est pas anodin. Quoi s'occupe de quoi ? Et qui a primauté sur l'autre ?

Il n'y a absolument aucun conflit entre ces deux organes, tous étant dirigés par des hommes liges de Ouattara. La Commission électorale indépendante est déséquilibrée au profit de Ouattara. Voyez vous-même : 85 % des membres de l'organe central sont membres du RHDP. Même les membres de l'opposition censés y appartenir ont été choisis par les soins de Ouattara ! Sur le terrain, sur les 549 commissions décentralisées censées surveiller la régularité du scrutin, le parti de Ouattara a fait main basse sur 529 postes ! La CADHP, sur saisine de la société civile, a rendu une décision ordonnant à l'État de procéder au rééquilibrage de cette CEI pour la rendre véritablement indépendante. Alassane Ouattara n'en a cure. Il marche sur le droit international comme il marche sur la vie et les libertés des Ivoiriens. Et cela est intolérable.

Comment voulez-vous qu'un processus électoral fiable se mette en place dans une telle asymétrie institutionnelle et dans une telle ambiance mortifère ? Nous n'accepterons la tenue d'aucune élection avec cette Commission électorale et ce Conseil constitutionnel partisans. Cela est hors de question, et nous formons un bloc populaire et majoritaire de plus en plus compact pour faire échec à cette mascarade barbare.

Une vue de l'Assemblée nationale ivoirienne lors d'une session en février 2019. Sur saisine de Guillaume Soro en tant que président de l’Assemblée nationale, "la Cour constitutionnelle avait rendu en 2018 une décision indiquant clairement que l’adoption d’une nouvelle Constitution n’efface pas totalement les dispositions juridiques pertinentes qui préexistaient, au nom du principe de la continuité législative"


Venons-en à la Constitution proprement dite. Qu'est-ce qui fait que, malgré tous les professionnels du droit que nous avons dans nos pays, dont des constitutionnalistes, on aboutit à des textes sujets à large interprétation, donc potentiellement générateurs de crise ?

La réalité est que, prenant le cas spécifique de la Côte d'Ivoire, il n'y a aucune forme d'interprétation possible. La Constitution a été rédigée principalement pour sauvegarder l'esprit républicain, laïque et social de notre pays. Elle réaffirme, et ce, depuis 2000, le principe intangible de la limitation à deux du nombre de mandats présidentiels. Tous les experts, membres éminents de la communauté des juristes nationaux, y compris le propre conseiller juridique d'Alassane Ouattara ainsi que son ministre de la Justice, ont dit publiquement, à plusieurs reprises, qu'une interprétation de la Constitution dans le sens d'un troisième mandat de M. Ouattara est absolument impossible.

Mieux, le Conseil constitutionnel, sur ma saisine en tant que président de l'Assemblée nationale, avait rendu en 2018 une décision indiquant clairement que l'adoption d'une nouvelle Constitution n'efface pas totalement les dispositions juridiques pertinentes qui préexistaient, au nom du principe de la continuité législative. Autrement dit, la nouvelle Constitution ne remet pas en cause les acquis démocratiques de la précédente. M. Ouattara est le seul qui pense qu'il lui est possible d'effectuer un troisième mandat au motif qu'étant à l'origine de cette nouvelle Constitution, il est le seul qui ait l'autorité nécessaire pour l'interpréter.

Il n'y a pas de troisième mandat présidentiel en Côte d'Ivoire. Il existe encore moins un prétendu premier mandat de la IIIe République, car si c'était la IIIe République, Ouattara aurait dû démissionner en novembre 2016 afin d'organiser de nouvelles élections présidentielles anticipées. On aurait alors compris sa fable actuelle du compteur constitutionnel remis à zéro. Mais Alassane Ouattara est resté président de la République de 2015 à 2020, parce que, comme il l'a lui-même publiquement et nombre fois affirmé, le principe de la limitation des mandats présidentiels au nombre de deux, valable depuis 2000, n'a jamais été interrompu par le constituant ivoirien.

L'interprétation des textes n'est donc pas du tout en cause. C'est l'intention et l'action frauduleuses de Ouattara qui piratent notre Constitution. Nous faisons face au braquage d'un peuple par un gouvernement corrompu et tyrannique.

Vous contestez la possibilité donnée à Alassane Ouattara par le Conseil constitutionnel de se présenter au scrutin du 31 octobre. Qu'aurait-il fallu faire au moment du référendum pour donner sa virginité à tous les acteurs politiques dans le cadre institutionnel ?

Je l'ai dit plus haut. La Constitution est claire : Ouattara ne peut pas être candidat à un troisième mandat. Ses juristes l'ont dit. Les rédacteurs de la Constitution l'ont affirmé. Le ministre de la Justice l'a déclaré devant les députés. Lui-même l'a déclaré dans plusieurs interviews.

Son revirement ne nous surprend guère, tant nous le connaissons comme un homme de reniement et de parjure. Quant au Conseil constitutionnel, lui aussi, ne nous étonne guère dans ses errements. C'est cette institution qui, en 2015, avait déclaré Ouattara candidat « par dérivation », après avoir accepté en 2010 qu'il soit candidat « à titre exceptionnel ». Aujourd'hui, on veut en faire un candidat « par effraction ». Et cela, nous ne sommes pas près de l'accepter. La Constitution n'est pas en cause, c'est la fraude à la Constitution que nous dénonçons.

Comment, alors que vous avez traversé des épreuves politiques ensemble pendant presque une décennie, en êtes-vous venus, le président Ouattara et vous, à vous opposer à ce point ? Une divergence politique, une divergence de personnes ou un choc des ambitions ?

Je dirais une divergence profonde sur les principes et les valeurs. J'ai été avec Ouattara pour bâtir une nation moderne, démocratique et respectueuse des droits et des libertés. Je n'ai jamais signé pour l'avènement d'un tyran qui pense que le pouvoir se trouve dans la soumission des citoyens à une forme de monarque absolu. C'est l'ancien Premier ministre Charles Konan Banny qui a le mieux résumé le profil psychologique de l'homme en disant que Ouattara ne conçoit les rapports avec lui qu'en termes de soumission. Pour Alassane Ouattara, les Ivoiriens doivent être à son service comme des esclaves au service de leur maître.

Comment comprenez-vous que Daniel Kablan-Duncan, compagnon de 40 ans d'Alassane Ouattara, ait décidé de le quitter en démissionnant de son poste de vice-président de la République ?

Comment expliquer la démission fracassante de Marcel Amon-Tanoh, son compagnon de lutte durant 30 ans ?

Comment expliquer que tous ceux qui se sont coalisés en 2005 pour faire de Ouattara le président de la République en 2010 aient tous été pourchassés ou emprisonnés par celui-ci ?

Anaky Kobéna est l'objet d'une procédure actuellement. Mabri Toikeusse est constamment menacé d'arrestations et d'assassinat. Bamba Moriféré est en exil en France, après avoir échappé à un assassinat. Bédié, qui lui a permis d'être élu face à Gbagbo en 2010 et en 2015, a échappé à de nombreux complots contre sa vie et contre l'intégrité de son parti. La réponse est simple : Alassane Ouattara est un psychopathe qui ne trouve la paix que dans la persécution des autres.

Je me sens moralement trahi par M. Ouattara, car, si j'ai risqué ma vie pour lui avec des milliers de mes camarades pendant près de deux décennies, c'est parce que je croyais en l'idéal technocratique qu'il a semblé incarner à merveille quand il a débarqué dans la politique ivoirienne au début des années 1990. J'ai dû déchanter quand j'ai découvert un homme qui avait une conception très archaïque, clanique, patrimonialiste et personnifiée du pouvoir.

D'aucuns disent que l'élection présidentielle du 31 octobre ne remplit pas les conditions d'un scrutin serein et viable alors qu'aucun texte ne s'y oppose. Quelles sont, pour vous, les conditions de tenue d'un scrutin crédible dans le respect des lois ivoiriennes et de l'aspiration des populations à une démocratie apaisée ?

Vous dites qu'aucun texte ne s'y oppose ? Bien au contraire. La CADHP dit que la CEI dans sa composition actuelle ne permet pas de garantir un scrutin transparent et équitable. La CADHP dit également que les poursuites contre moi sont politiquement motivées et ordonne au gouvernement ivoirien ma réintégration sur la liste des candidats. Les diplomates de l'UE disent que le scrutin sans les poids lourds de l'opposition n'est ni crédible ni transparent et qu'il faut davantage d'inclusivité. Il faut donc que nous revenions à plus de sérénité. Il faut que les élections soient reportées de plusieurs mois. Cela permettrait de procéder à une recomposition de la CEI conformément à la décision de la CADHP. Ensuite, nous pourrons faire un audit international de la liste électorale pour laquelle les preuves abondent dans le sens de sa manipulation par le RHDP. Il faudrait absolument changer le Conseil constitutionnel qui a donné la preuve de son mépris pour la Constitution. Mais, avant tout cela, il faut décrisper la situation politique nationale en permettant le retour de tous les exilés sans exception, je pense ici au président Laurent Gbagbo, à Charles Blé Goudé, à Akossi Bendjo, à Bamba Moriféré, à moi-même, bien entendu. Et à la libération de tous les prisonniers politiques, civils et militaires de tous les camps.

Si, finalement, le scrutin se tient et qu'aucune décision ne vous requalifie. Qu'allez-vous faire ? Appeler au boycott, soutenir un candidat contre Alassane Ouattara ? Si oui, lequel ?

Pour le moment, je ne m'inscris pas dans un schéma où cette élection pourrait se tenir, alors que j'en aurai été illégalement écarté. Je ne l'accepte pas. D'ailleurs, j'ai lancé un appel à l'union de toutes les forces politiques significatives pour faire barrage au désir irrationnel de M. Ouattara d'imposer sa volonté d'effectuer un troisième mandat en marchant sur la Constitution. Je suis heureux que cet appel ait rencontré un écho favorable auprès des principales formations politiques ivoiriennes. Ainsi, le président Henri Konan Bédié, président du PDCI-RDA après concertation avec l'ensemble des partis politiques, a lancé un appel à la désobéissance civile que nous soutenons activement. Il faut que Ouattara recule et que le droit prévale.

Et la Cedeao, l'Union africaine, l'Union européenne, l'ONU savent qu'il est vraiment temps de sauver la paix en Côte d'Ivoire en faisant entendre raison à M. Ouattara.Au-delà du scrutin à venir, quel modèle politique, selon vous, permettrait à la Côte d'Ivoire d'avoir des institutions stables et solides ?

Le système actuel est caractérisé par une boulimie du pouvoir de l'exécutif. Une voracité monstrueuse qui broie à tour de bras nos libertés fondamentales chèrement conquises par des décennies de luttes précédentes ! Il nous faudra l'éradiquer par une réelle séparation des trois pouvoirs de l'État et par un pluralisme global exemplaire en Côte d'Ivoire.

Il est nécessaire de bâtir un modèle politique et citoyen dans lequel la primauté de la loi et du droit aurait une valeur sacramentelle. Il est évident que, dans l'immédiat, il faut bâtir un État de droit. Ce qui présuppose que nous ayons une justice indépendante, une armée républicaine et amie du peuple. Nous bâtissons patiemment depuis les années 1990 un modèle de démocratie pluraliste, dans lequel les pouvoirs de l'exécutif sont contrôlés par un Parlement dynamique et une société civile forte. Je suis favorable à un régime présidentiel tempéré par une Assemblée nationale ayant pouvoir de censure sur le gouvernement. C'est un modèle qui a fait ses preuves et qui offre plus de redevabilité que d'autres types de régime dans lesquels le chef de l'État est une sorte de monarque absolu. Ce modèle serait une étape vers un régime de type semi-parlementaire ou parlementaire. Il reviendra aux Ivoiriens d'en décider le moment venu.

Pensez-vous qu'il faille réfléchir à un autre fonctionnement entre toutes les entités du pays : pouvoir politique à la capitale, pouvoir local dans les villes des différentes régions, structures de la société civile, autorités traditionnelles et religieuses ?

Ce que vous décrivez constitue un pan important de notre projet de société. C'est la refonte en profondeur du système actuel de décentralisation. Nous y avons consacré une réflexion riche, dense, que nous entendons proposer à nos compatriotes. Mais ce que je peux vous résumer est qu'il faut déplacer le pôle de réflexion et de décision vers les populations en créant une décentralisation forte, avec des régions autonomes économiquement viables, dotées d'un véritable pouvoir économique, financier, social. Ces régions seront les moteurs du développement local, et l'État, à travers le corps des fonctionnaires territoriaux, aura un rôle de superviseur de projet et de garant de l'efficacité de la dépense publique.

En vue d'une responsabilisation et d'une meilleure représentativité à tous les niveaux de décision, ne serait-il pas opportun de penser autrement l'État central actuel en

le transformant en confédération ?

Nous sommes un micro-État dans un continent déjà balkanisé. La solution n'est pas d'aller vers plus de morcellement, mais, au contraire, vers plus de rassemblement. Nous n'avons pas, Dieu merci, de problème de cohésion nationale. Nous avons juste un problème de dirigeants qui ont du mal à s'accommoder avec les règles de la démocratie. Mais ça, nous allons le régler bientôt.

Kwame Nkrumah a beaucoup milité pour l'unité politique de l'Afrique. Quelle idée vous faites-vous de celle-ci dans le sillage de l'intégration économique continentale qui se met en place actuellement ?

L'Afrique devrait être l'un des plus grands marchés internes du monde. Elle en a le potentiel, les ressources humaines, mais, hélas, pas encore les institutions. L'unité politique de l'Afrique parachèvera le processus d'union économique et financier en cours au niveau de l'Union africaine. Je pense sincèrement que l'intégration économique en cours impulsera fatalement l'intégration politique du continent.

L'Afrique, à elle seule, a un marché intérieur qui équivaut à celui de la Chine. Sa population est jeune, elle a les mêmes rêves, du Caire à Kigali, elle adopte rapidement les TIC, une classe moyenne s'installe durablement, un taux de croissance moyen de 6 % est maintenu depuis plusieurs décennies, le continent se débarrasse peu à peu du fardeau de la pauvreté, avec l'avènement de dirigeants jeunes et visionnaires.

Plus l'Afrique se réunit dans de grands ensembles, économique, d'abord, politique, ensuite, plus elle a de chances de compter au niveau mondial. L'Afrique peut se réunir autour de pôles économiques dominants, le Nigeria, l'Afrique du Sud, l'Égypte, l'Algérie, pour peser sur le commerce mondial. C'est ainsi que se réalisera, plus facilement, le rêve de l'unité africaine cher à Kwame Nkrumah.

Comment vous imaginez-vous ainsi que la Côte d'Ivoire dans cette construction pour les années à venir ?

La Côte d'Ivoire a indubitablement un rôle de locomotive sous-régionale à jouer. Nous avons une des économies les plus dynamiques du continent, une population jeune et cosmopolite, une tradition d'ouverture et d'hospitalité. J'ai l'ambition de réconcilier définitivement ce pays qui fait une éruption de violence tous les dix ans, d'asseoir durablement la culture démocratique et de réorienter l'action publique vers la création d'une vraie richesse nationale avec l'émergence d'entrepreneurs locaux dynamiques, soutenus énergiquement et accompagnés par l'État.

Je mènerai donc, avec détermination et confiance, le combat pour la conquête de l'État de droit et de la démocratie, clé de voûte de tous les succès futurs. Seule une Côte d'Ivoire unie autour du pardon et de la réconciliation pourra surmonter, dans le cadre exemplaire de l'État de droit et de la démocratie surgis de ses propres entrailles, les défis sociaux, écologiques, économiques, culturels, stratégiques, politiques et même spirituels qui nous attendent. J'ai confiance en notre avenir, voilà pourquoi nous nous battrons pour que nul ne vole à notre peuple la flamme sacrée de l'espérance heureuse.