Côte d'Ivoire-L’opposition donne 48 heurs à Ouattara pour les appeler au dialogue sur le processus électoral

Plusieurs milliers d’opposants au régime d’Alassane Dramane Ouattara se sont réunis hier sous un soleil accablant à la place Ficgayo à l’invitation de la coalition nationale pour le changement. Ses leaders qui se sont ensuite succédé sur le podium ont réitéré leur appel au dialogue afin de
discuter avec Ouattara des conditions d’une élection transparante, régulière et crédible.
Un jour avant l’ouverture officielle de la campagne électorale,
six candidats sur les neuf opposés au chef de l’état sortant
Alassane Dramane ont réuni hier à l’espace Ficgayo de Yopougon
plusieurs milliers de partisans pour protester contre
les conditions d’organisation du scrutin du 25 octobre. Inaugurant
la liste des intervenants, la présidente de l’URD Danièle
Boni-Claverie qui parlait également au nom d’une coalition de
quatre partis (RPP, PIT, USD et URD) a dénoncé à la fois les
conditions politiques dans lesquelles
ce scrutin est organisé, notamment le maintien en prison
de Laurent Gbagbo, et l’absence de transparance dans la
préparation du scrutin.
Saluant le courage des militants, elle a
réitéré le report pur et simple de l’élection présidentielle pour
que soient mises en place les conditions d’une élection régulière.
La présidence de l’URD a également interpellé les candidats
à se déterminer clairement sur leur participation ou non à
ce scrutin. Très applaudie pour la tonalité de son plaidoyer sans concession, la présidence de l’URD a cédé la place aux différents candidats qui ont noté, à l’instar de Siméon Konan Kouadio les raisons pour lesquelles il s’est rapproché de la CNC, en particulier parce que le changement est nécessaire pour réconcilier les Ivoiriens.
La star du jour fut tout de même l’ancien président de
l’Union Africaine Essy Amara dont c’était le premier bain de
foule à une manifestation de la coalition nationale pour le
changement. Premier à décider de boycotter le scrutin présidentiel
du 25 octobre, l’ancien ministre des affaires étrangères
d’Houphouët-Bopigny puis de Bédié a été accueilli comme une
rock star. Essy Amara dont le passage à la tribune fut fugace
est d’ailleurs remonté sur l’estrade pour démentir la déclaration
d’Alassane Dramane Ouattara qui, en réaction à sa
décision de suspension, a affirmé qu’il lui avait dit, de toute
façon, qu’il ne serait pas candidat.
De quoi faire dresser les cheveux sur la tête du diplomate
qui a dit pratiquer Alassane Dramane Ouattara depuis
1971 et que « personne ne connait mieux la Côte d’Ivoire
que ses propres fils », provoquant l’hilarité générale. Sans
jamais faire allusion à sa décision de suspension, l’ancien
président de l’Union Africaine a dénoncé une nouvelle fois les
conditions dans lesquelles les élections présidentielles ont été
organisées.
A ce jeu, c’est le président de Lider qui a été le plus complet. Mamadou Koulibaly a en effet dénoncé tour àtour l’absence de sécurité. « La plupart des populations que j’ai visitées que ce soit à Séguela, à Bouaflé ou ailleurs ont tous dit qu’ils ont peur parce que les élections débouchent sur la guerre dans leurs contrées ».
L’ancien président de l’assemblée a d’ailleurs lui-même illustré
cette insécurité par son propre cas puisque, a-t-il dit,
chaque fois qu’il est passé dans une ville, les gendarmes ou les
policiers ou alors les hiérarques locaux sont allés ensuite menacer
les populations au nom des voix qu’ils auraient promises à
Alassane Dramane Ouattara.
Le président de Lider a ensuite parlé du processus électoral qui
ne rassure point puisque les candidats n’ont toujours pas
connaissance de la liste électorale, les fichiers qui leur ont été
distribués à deux jours de l’ouverture officielle de la campagne
de s’ouvrant pas. « Nous ne sommes pas prêts pour des
élections en Côte d’Ivoire », assure- t-il « parce que les organisateurs eux-mêmes ne sont pas prêts ».
Autre anomalie, sur les dix candidats, seulement deux sont représentés à la CEI alors que des partis qui ne sont pas candidats au prochain scrutin y sont représentés.
Face à autant de manquements, Mamadou Koulibaly s’en est
également pris à la communauté internationale qu’il accuse
d’être permissive à l’égard de Ouattara alors qu’elle l’est
moins à l’égard de Mugabé ou autres.
C’est pourquoi il leur donne 48 heures pour remettre
Alassane Dramane Ouattara sur le droit chemin. Car après,
« ne venez pas nous dire qu’on ne savait pas ».
Avant que le président de la CNC Charles Konan Banny ne
cloture la rencontre, le président délégué du FPI Laurent
Akoun a dit pourquoi les élections
à venir sont dangereuses.
Pour lui, « les conditions des élections ne sont pas réunies
mais également les conditions politiques ».
Il a donc dénoncé la détention des prisonniers politiques
dont il réclame la libération alors que Ouattara, dit-il,
n’est toujours pas éligible pour le scrutin à venir.
« Ouattaralui-même n’est pas éligible ; il ne doit même pas être candidat », a réitéré Laurent Akoun qui a repris le célèbre slogan deLaurent Gbagbo : « asseyonsnous et discutons ! ».
En montant sur le podium dressé pour le discours des officiels,
Charles Kona Banny a esquissé quelques pas de danse
sur les airs d’une chanson qui lui est dédiée. Pour lui, c’est le
cadeau qu’il fait aux responsablesde la mobilisation du jour
et en particulier Marie-OdetteLohourougon qui, comme à ses
habitudes, fut au four et aumoulin. Mais au fur et à mesure
de son allocution,Charles Konan Banny est devenu grave,
dénonçant le piège que Ouattara leur a tendu la veille du
meeting « pour dire après qu’ils ne sont pas venus », a-t-il anticipé.
Comme la plupart des intervenats, il a demandé la
libération des prisonniers politiques et le retour des exilés.
Revenant sur les conditions d’organisation du processus
électoral, Banny a indqué que les candidats ne sont pas prêts
parce que les conditions ne sont pas réunies pour une élection
sans violence ; une élection quiferait zéro mort avant, pendant
et après. Pour le reste, Charles Konan Banny a encore demandé
à Alassane Dramane de les recevoir pour que le dialogue
se noue. Lui parlant directement, le président de la
CNC a indiqué qu’il n’a pas le monopole de l’intelligence et
que ce n’est pas à lui de choisir son opposition.
« Nous voulons un processus électoral consensuel
et non confidentiel (…)
parce que la république n’estpas un royaume », a encore dit
Banny qui hier a semblé faire de grands efforts pour ne pas en
dire trop.
un aperçu du monde et ESSY AMARA EST LÀ-Les ivoiriens ont soif de démocratie



